Témoignage de Célia - Shree Barahi Primary School

Namaste,

Je m’appelle Célia et de retour d’un voyage humanitaire au Népal, je m’apprête à te raconter la plus belle expérience de ma vie. Faire une mission humanitaire était pour moi quelque chose d’inaccessible, un rêve et plutôt l’objectif d’une vie. On se dit toujours qu’on n’aura jamais les moyens de réaliser ce genre d’action: pas le temps, pas assez d’argent, trop de peur et d’appréhension, pourtant cela ne dépend que de nous. J’ai 22 ans, je suis étudiante, je n’ai pas de revenu fixe, j’ai un emploi du temps bien chargé, et j’ai quand même pris la décision de partir. Parce que oui, chacune des décisions que vous allez prendre va façonner votre vie et parfois une petite action peut tout changer.

Je n’ai pas voulu attendre d’avoir 50 ans pour me dire que je n’avais toujours pas réalisé mes rêves et qu’il était temps pour moi de donner au monde ce que j’avais pu recevoir sans difficulté. Voulant créer cette opportunité j’ai pris la décision de contacter Terry. Deux mois plus tard je partais direction le Népal pour réaliser une mission humanitaire d’une semaine et une Humanity Walk. Débutante totale dans le voyage j’allais pour la première fois sortir de l’Union Européenne, prendre l’avion, et aller dans un pays que je ne connaissais absolument pas. Comme tu l’auras compris c’était la grande aventure pour moi. Pourtant à aucun moment je ne me suis demandée si j’allais regretter et je me suis jetée dans l’inconnu en toute sérénité. J’ai donc fait mon passeport en urgence, pris mon sac à dos et le 19 février au soir me voilà partie pour le Népal.

Je ne te le cache pas, le dépaysement fut total. On s’est retrouvés livrés à nous même dans un pays inconnu. Étant venue avec des amis il a été beaucoup plus facile pour moi de ne pas paniquer face à une situation comme celle-ci. Le visage le plus rassurant a de loin été celui de Santosh venu nous récupérer à l’aéroport. Après ça, tout s’est enchaîné très vite … Après un accueil plus que chaleureux de la famille de Santosh, il était temps pour nous de rencontrer les enfants de Shree Barahi.

La première rencontre a été plus qu’exceptionnelle. Je m’attendais à ce qu’ils soient timides, qu’ils aient du mal à se dévoiler, en réalité ils ont été très à l’aise et beaucoup plus que moi d’ailleurs. Je me suis retrouvée face à des enfants débordant d’énergie, plein de vie et avec pour seule volonté de donner le plus d’amour possible. Une semaine c’est très court pour faire une mission humanitaire.

Accompagnée de Juliette, ma bahini, on s’est vite rendues compte que le temps qui nous était dédié était très court comparé aux nombreux projets qu’on avait envie de mettre en place. Pour être tout à fait honnête, cela a même été très frustrant. Submergées par toutes ces émotions positives, l’énergie des enfants, la frustration s’est vite installée quand on s’est rendues compte que tout n’allait pas être réalisable. Cependant, on s’est vite recentrées sur l’essentiel: il fallait qu’on donne le meilleur de nous-même à ses enfants qui le méritaient tant.

La semaine est passée à une vitesse folle et pourtant en une journée on avait l’impression d’en avoir dix. Plus les enfants se dévoilaient et plus on partageait des moments de complicité forts, les liens se créaient, les émotions se multiplient et on sent vite que le départ va être de plus en plus difficile.

J’aimerais faire un petit point qui me paraît assez important sur l’éducation. Leur éducation est basée sur la rigueur, le respect, la responsabilité mais il en découle aussi des aspects beaucoup plus marquants. La violence en fait partie. Je n’ai pas été trop confrontée à la violence pendant ma mission mais on remarque très rapidement la peur des enfants lorsque l’on fait des gestes trop brusques. Il faut savoir qu’ils récitent par cœur, ils répètent à l’unisson sans forcément comprendre ce qu’ils disent et tout ça dans une ambiance quasi militaire. Il y 5 classes pour 3 professeurs. Tu peux t’en douter, certaines classes sont donc laissées de côté et les enfants sont livrés à eux même, pourtant, tous restent très disciplinés.

Pour moi, l’éducation devrait être le moyen de s’exprimer. Alors je me pose des questions:  pourquoi brider des enfants à une éducation basée sur un apprentissage comme celui-ci et en aucun cas sur la créativité, l’art, et l’expression corporelle ? Comment un enfant peut trouver son identité et savoir ce qu’il veut si on ne le laisse pas s’exprimer ?

Pour revenir aux enfants, la différence est frappante. L’égalité homme femme est loin d’être une priorité au Népal et on sent vite la pression faite aux femmes. Les filles se font très souvent reprendre par les garçons, verbalement comme physiquement. Mais étrangement, cela n’a pas empêché de souligner le profond respect qu’ils pouvaient avoir les uns envers les autres et surtout envers nous-même. Pour te donner un petit exemple, on a décidé une après-midi de faire un foot. Les enfants étaient tellement heureux qu’ils sautaient partout et vu l’état de leur vêtement à la fin de la partie ça ressemblait plus à du rugby. Pourtant à chaque marque de ballon sur nos vêtements les enfants se précipitaient pour enlever toutes traces de terre. Il fallait qu’on soit propre de la tête au pied alors qu’eux pouvaient se jeter partout sans se soucier de leur état.

Le souci de l’autre, voilà une valeur qu’on oublie trop souvent. Je ne te parle pas de donner quelque chose à une autre personne pour ton propre intérêt. Je te parle là de te soucier réellement de quelqu’un, de savoir comment il va, comment il est, comment il se sent. Les enfants ne se sont jamais plaint, pas une seule fois en une semaine.

Et c’est une réelle claque de voir que ces enfants, si innocents soient-ils possèdent une telle vie. Pour la plupart ils n’ont rien. Et pourtant ils vous donnent tout. Tout le bonheur et l’amour qu’ils peuvent donner ils le donnent. Alors je me pose une question ? Qui est le plus heureux ? Nous ou eux ? En réalité ils ont tout compris. Ils sont heureux de voir que des gens viennent les aider. Mais les aider pour quoi ?

Il est alors de notre devoir, et oui je pèse mes mots en disant devoir, de montrer à ces enfants, enseignants qu’il existe d’autres méthodes d’apprentissages, d’autres manières de s’épanouir. Notre mission est d’apporter cette nouveauté aux enfants, cet aspect différent de l’éducation par l’art, la créativité, l’activité physique. Sensibiliser ces enfants mais aussi les professeurs à une éducation nouvelle. Une éducation qui favorise le développement personnel de l’enfant. Vous me direz certainement qu’en une semaine ce genre de choses n’est pas réalisable voir impossible, seulement un jour quelqu’un m’a dit que c’est comme quand vous plantez des graines, vous vous demandez ce qui va pousser … et puis vous attendez, encore et encore et soudain il y a plein de fleurs… et vous ne pouvez pas imaginer à quel point c’est beau. La vie est vraiment belle donc il faut arrêter d’écouter des gens qui n’y croient pas mais il faut essayer de les aider à voir ces fleurs. Parce que même dans les pires moments il y a des fleurs.

Si vous devez retenir une chose de tout ça c’est qu’une action même infime produit de grands effets.

En venant au Népal, je m’étais préparée à voir la misère, la tristesse d’un pays pauvre. En réalité je n’ai vu que des personnes formidables et des enfants extraordinaires prêts à donner tout ce qu’ils avaient. En faisant une mission humanitaire j’ai voulu apporter mon aide à ses enfants et à ce pays. Le plus surprenant dans tout ça c’est qu’en retour ils m’ont tout donné et je suis tombée amoureuse de ces gens, de cette culture, de ce pays…

En une semaine je me suis attachée à eux comme jamais je n’aurais imaginé et je souhaite à toute personne lisant ce texte, à toi, de rencontrer ces personnes. Je te souhaite de te rendre compte à quel point certaines valeurs sont essentielles et de prendre la claque que j’ai pris. En fait… simplement d’avoir une leçon de vie. 

Si je peux te donner un conseil et que tu hésites encore à faire une mission humanitaire, la seule chose que je pourrais te dire c’est que tu es le seul responsable de tes actions, toi seul possède les moyens de créer cette opportunité, donc va au bout des choses.

Je tiens à remercier du fond du cœur toutes les personnes que j’ai rencontrées là-bas mais surtout Saraswati pour tout l’amour qu’elle donne aux enfants et sa bienveillance, Santosh qui restera la personne la plus inspirante de cette Terre, Terry pour tout son soutien et surtout tous les enfants de Shree Barahi à qui je dis à très bientôt …